Dix mythes à propos de ceux qui quittent les églises

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je reproduis un article paru dans blogdéi 3.0  (traduction d’un article de Reality faite sur voxdei au début des années 2000 – Un magazine néo-zélandais chrétien Évangélique proche du BCNZ Bible Collège of New Zealand). « Dix Mythes à propos de Ceux qui quittent les églises » par Alan Jamieson, pasteur Baptiste (Wellington Central Baptist Church – Nouvelle Zélande)

Bien que l’on se répète tout le temps, comme un mantra, « que les gens désertent l’Église », il apparaît aujourd’hui qu’il y a très peu de compréhension du phénomène. Qui quitte ? Quand quittent-ils ? Pourquoi quittent-ils et qu’arrive-t-il à leur foi après qu’ils aient quitté ? Bien sûr chacun a sa propre explication mais très peu, et spécialement nos leaders d’unions d’églises ont pris le temps de s’asseoir et de parler avec un « transfuge » ou deux.

C’est beaucoup plus facile de s’occuper des stéréotypes que des gens, spécialement si les préjugés ne nous aident pas réellement à comprendre ce qui se passe. Pour ceux qui veulent approfondir et se demandent « Qui sont ces gens et pourquoi quittent ils l’église ? » un examen attentif de quelques mythes propagés sur les « transfuges d’église » peut nous éclairer.

MYTHE N° 1 : ON QUITTE SEULEMENT LES EGLISES TRADITIONNELLES

Il est prouvé que les gens qui quittent les églises traditionnelles quittent aussi les églises Évangéliques, Charismatiques et Pentecôtistes. Ce sont les églises qui ont eu la plus grande croissance à la fois en Nouvelle Zélande et au-delà. Ce sont les églises qui avec leur focalisation sur l’enseignement biblique, l’adoration joyeuse et de plus grandes opportunités de participation dans les structures ont attiré beaucoup de jeunes convertis ainsi que les déçus des églises traditionnelles.

Mais ces églises en pleine croissance ont aussi une « porte de sortie ». Des estimations dépendent de la personne à qui vous parlez. Mais des études comme celle d’Elaine Bolitho sur la porte de sortie de des Eglises Baptistes de Nouvelle Zélande ont montré le degré de perte de ces soi-disant « églises en pleine croissance ».

Elaine Bolitho a étudié les chiffres des églises Baptistes. Elle a trouvé qu’entre 1989 et 1996 les églises Baptistes de Nouvelle Zélande ont eu un léger déclin global (de 23 601 membres à 23 031).

Pendant cette période plus de 11 000 nouveaux membres s’y sont intégrés. Si on tient compte des décès et du fait que les églises Baptistes répertorient les transferts d’église elle a trouvé que 10 118 membres étaient ‘perdus’, sans laisser de trace.

Cela signifie que pour ces 7 années (1989 à 1996) le résultat net a été une perte de 570 personnes – un pourcentage de plus de 108% des nouveaux membres, pour chaque ajout de 100 membres, 108 sont partis. Ceux qui quittaient ne pouvaient être répertoriés comme transférés dans une autre église ou décédés.

C’était une augmentation substantielle si l’on compare avec des périodes précédentes de 1948 et 1988 pour laquelle Elaine Bolitho a fourni les chiffres et les éléments de comparaison.

Les chiffres des églises pentecôtistes montrent aussi un grand nombre de défections. Les chiffres de l’église Apostolique de Nouvelles Zélande (même nom qu’en France) ont montré des croissances rapides, mais un examen plus attentif des chiffres montre un taux de défection d’à peu près 10% par an. Si les chiffres d’Elaine Bolitho et ceux des autres groupements d’églises se reproduisent dans les autres groupements d’églises évangéliques, charismatiques et pentecôtistes cela indique qu’il y a un nombre notable (peut-être croissant) de défections dans ces églises.

MYTHE N°2 : LES GENS QUI QUITTENT SONT DES JEUNES ADULTES, DE LA FRANGE DE NOS EGLISES ET LES GENS QUI NE SONT PAS DANS L’ÉGLISE DEPUIS LONGTEMPS.

Evidemment quelques personnes sont dans ces catégories, mais ils ne sont pas les seuls à partir. Dans la recherche basée sur 108 interviews de personnes concernées au travers de la Nouvelle Zélande.

J’ai trouvé que ceux qui quittaient les églises Pentecôtistes et Charismatiques étaient avant tout d’âge moyen (70% avaient entre 35 et 45 ans) et avaient été impliqués dans leurs églises respectives en tant qu’adultes (au-delà de leur 18ème anniversaire) pendant plus de 15,8 années. De toutes les catégories de défections c’est cette catégorie que très peu sont prêts à prendre en compte.

MYTHE N° 3 : CEUX QUI ONT DES ENFANTS NE QUITTENT PAS L’ÉGLISE

En 1990 le magazine NEWSWEEK a publié un article intitulé « Et les enfants les conduiront » : Les jeunes Américains retournent à Dieu. L’article suggérait que les jeunes, éduqués dans les églises dans les années 60 (qu’ils avaient quittées), étaient contents de retourner à l’église quand ils devenaient parents eux-mêmes.

Ceci a été appuyé par l’étude de Roof dans laquelle il a noté : « indubitablement, les raisons que les gens citent pour retourner à l’église ont quelque chose à voir avec la vie de famille. L’influence de l’épouse et le souci de conserver l’harmonie de la famille sont des facteurs forts, mais l’éducation religieuse des enfants est quelque chose de plus important ». La présence de jeunes enfants et le sentiment de responsabilité paternelle font revenir les baby-boomers dans les églises.

Bien que nous puissions comprendre que ce sont les enfants qui conduisent leurs parents, ou qui les maintiennent dans nos églises. Cette assertion est remise en cause par les choix faits par les personnes que j’avais interviewées. 80% avaient des enfants mais néanmoins ils avaient quitté leur église, avec la conséquence inévitable que leurs enfants l’avaient quittée aussi.

Depuis quelques temps maintenant les leaders de groupes de jeunes ont suggéré que le groupe d’âge intermédiaire devient le groupe crucial en matière d’intérêt et d’implication dans l’église pour les enfants. Il se peut que quand les enfants maugréent pour aller à l’église au grand dépit de leurs parents, la situation est mûre prête pour que la famille quitte l’église ensemble.

MYTHE N° 4 : SI MAMAN ET PAPA VONT A L’ÉGLISE, LEURS ENFANTS IRONT A L’ÉGLISE AUSSI ?

De manière générale on croit qu’une foi et une pratique d’église forte et pratiquée depuis l’enfance influencera le comportement adulte. Quoiqu’une telle influence puisse aussi bien affecter les croyances, les valeurs et les contenus de la foi, une étude récente a remis en question l’impact de la fréquentation de l’église et quelle implication elle a sur l’enfance.

Une étude américaine – sur 500 adultes Presbytériens (Réformés Evangéliques) entre 33 et 42 ans- a montré que « l’influence des liens parentaux positifs était très faible. » Ils ont conclu que « les effets de la pression sociale avaient peu d’impact sur les résultats finaux », beaucoup moins que dans des recherches passées et la raison était probablement liée au fait que la population concernée consistait en adultes d’au moins 33 ans, alors que les études précédentes portaient sur des étudiants de lycée ou d’université.

« Les effets de l’apprentissage social pendant l’enfance et l’adolescence apparemment disparaissent sous la pression d’influences extérieures ». Ce point de vue est soutenu par une autre étude qui a prouvé que les conjoints devenaient plus importants que les arrière-plans religieux de l’enfance.

Dans mes propres recherches (quoique les recherches qualitatives portent sur un petit échantillon) il n’y avait pas d’indications de différence entre la foi de ceux qui avaient un arrière-plan d’église solide et ceux qui venaient d’arrière plans nominaux (non pratiquants) ou même d’arrière-plan sans fréquentation d’église.

Pour les gens que j’ai interviewés :

– 28% avaient connu des arrières plan d’église solides en tant qu’enfants (ils fréquentaient les programmes d’enfants et de jeunes que faisait l’église et leurs parents les encourageaient à le faire en s’impliquant eux-mêmes dans l’église)

– 40% venaient d’arrière plans nominaux (ils fréquentaient quelques programmes pour enfants ou jeunes, mais n’étaient pas encouragés par la fréquentation de leurs parents ni par leur implication)

– 30% de ceux qui quittaient les églises n’avaient pas d’arrière-plan d’église dans leur enfance et leur adolescence.

MYTHE N° 5 : LES GENS QUI QUITTENT MANQUENT DE CONSÉCRATION

Les 108 personnes que j’ai interviewées avaient fait des choix adultes (après leur 18ème anniversaire), de consécration à la foi chrétienne et à leur église locale. Pour un certain nombre c’était la poursuite d’engagements précédents, tandis que pour les autres c’était un choix adulte délibéré.

94% de ceux que j’ai interviewés avaient été impliqués significativement comme leaders dans leur église et 40% avaient été impliqués pendant un an ou plus dans une activité à plein temps (rémunérée) pour une église locale, une organisation para-ecclésiastique, ou des groupes missionnaires outre-mer, ou avaient étudié dans une institution théologique. Beaucoup avaient fait les deux.

MYTHE N° 6 : LES GENS QUI QUITTENT N’ONT PAS DE FONDEMENTS SOLIDES DANS LA FOI

A nouveau il est dur de justifier de la représentativité des rencontrées. Les gens interviewés avaient été membres de leurs églises depuis 15,8 années.

94% avaient occupé des positions de leadership dans l’église et 40% avaient travaillé à plein temps comme chrétiens pendant plus d’un an. Un tiers avait entrepris et terminé des études de théologie. En plus beaucoup témoignaient d’une foi vivante et de l’expérience de Dieu dans leurs vies.

MYTHE N°7 : ILS ONT QUITTÉ CAR LES GENS DE NOS JOURS SONT TROP STRESSÉS

Beaucoup de pasteurs remarquent les pressions sur la vie des gens, (l’effet de plus longues heures de travail et l’effet du retour des femmes dans les bureaux) et de plus grand nombre de possibilités de loisir (sport le dimanche, télévision, plus de restaurant et de cafés) comme des raisons pour lesquelles les gens cessent d’assister à l’église.

Les gens que j’ai interviewés étaient conscients de ces changements dans leur style de vie, un certain nombre en ont parlé comme facteurs contributifs mais personne n’a mentionné le manque de temps comme un facteur déterminant dans leur décision de quitter l’église.

Derrière le témoignage de chaque personne il y avait des facteurs plus significatifs que « le manque de temps pour participer à la communauté de l’église ». En fait beaucoup des personnes avaient remplacé le temps passé à l’église par des activités spirituelles et des engagements qui nourrissaient leur foi.

MYTHE N° 8 : ILS QUITTENT A CAUSE DE DESACCORDS PERSONNELS AVEC LES LEADERS DE L’EGLISE.

Pour un petit pourcentage de ceux avec qui j’ai parlé, les raisons principales de leur défection avaient à voir avec la direction ou la vision de leur église ou des désaccords avec les leaders. C’était très rare que le sujet soit unique. La plupart des gens ont invoqué une série de déceptions de désagréments avec les leaders pendant une période prolongée de leur vie.

Pour la vaste majorité, de tels points de désaccords n’étaient que des points mineurs dans leur décision de départ. Pour beaucoup ce n’était que le point final dans le processus du départ qui s’était prolongé pendant une période de quelques mois, si ce n’est d’années.

MYTHE N° 9 : ILS REVIENDRONT

Les « partants » interviewés assuraient avec passion qu’ils ne retourneraient pas à l’église qu’ils avaient quittée. Dans la plupart des cas où j’ai pu rester en contact avec eux j’ai vu que la majorité d’entre eux n’était pas revenus.

Quelques-uns reviennent, vaguement impliqués à la marge des groupes d’églises qu’ils ont quittés. Ils le font en allant à la messe Catholique, la Communion Anglicane, les groupes Taizé, les groupes Celtiques (de piété irlandaise, peu connu), les groupes multimédias (musique…) ou alternatifs.

Même quand les gens reviennent dans une autre église évangélique ou pentecôtiste ou charismatique ils restent sur les bords et ne s’impliquent pas dans le leadership ou les rôles centraux dont ils avaient l’habitude ;

Souvent il y existe une raison pour leur retour, le fait que l’église fournisse un groupe de jeunes attractif pour leurs jeunes.

MYTHE N° 10 : ILS SONT RETROGRADES ET ABANDONNENT LA FOI

Quand j’ai commencé ma recherche je m’attendais à ce que plus les gens  avaient quitté l’église depuis longtemps et plus leur foi avait décliné, et à la fin ils auraient quitté la foi chrétienne.

Ce n’était absolument pas le cas pour les personnes que j’ai rencontrées.

En fait ces personnes étaient très lucides, elles ont quitté leur église et elles n’ont pas de plan de retour, elles affirment qu’elles persévèrent dans la foi chrétienne.

 

BIBLIOGRAPHIE ET NOTES

Bolitho, E.E. (1997) Hole in the Bucket. Seminar to Auckland, Waikato and Bay of Plenty Baptist leaders, October 1997 (Auckland).

Taylor L. 1997 « Denominational Growth » in Patrick B. (ed) New Vision New Zealand Vol II, Auckland, Vision New Zealand. p 69

W C Roof: A Generation of Seekers: The Spiritual Journeys of the Baby Boom Generation, San Francisco Harper, 1993, p 246.

Hoge, D.R.; Johnson, B.; Luidens, D.A. (1993) « Determinants of church involvement of young adults who grew up in Presbyterian churches », Journal for the Scientific Study of Religion: Vol 32 No 3, p 242-255.

Willits, F.K. & Crider, D.M. (1989) “Church attendance and traditional religious beliefs in adolescence and young adulthood: a panel study” Review of Religious Research. Vol 31, No 1, p 68-81.

Note du traducteur

Alan Jamieson fait partie d’un groupe basé à Wellington ‘Spirited Exchanges’, qui fournit un forum pour ceux qui ont quitté l’église ou n’ont pas trouvé d’aide dans pour poursuivre leur itinéraire spirituel. Le groupe est un ministère de l’Eglise de la « Wellington Central Baptist Church », où Alan est co-pasteur senior. Il a passé un doctorat de sociologie sur le sujet « Churchless Faith/Foi sans Eglise », qui analysait pourquoi les gens quittaient les églises et comment se déroulait leur itinéraire spirituel après leur départ.

© Reality magazine, New Zealand’s Christian bimonthly, freepost 4428 c/o BCNZ, Private Bag 93-104, Henderson, Auckland 1231 NZ.

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